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Le strip-till (littéralement « travail du sol en bande » en anglais, de strip : "bande" et till : « travail du sol") est une technique qui consiste à travailler uniquement la bande dans laquelle on va semer la future culture. Cette technique vient d’Amérique du Nord et a réellement décollé en France après les années 2010. Elle possède de nombreux avantages économiques et agronomiques comparée à un système labour, à condition de bien la maîtriser. Le réglage d’un strip-till est délicat : il doit être bien réglé et intégré dans une réflexion agronomique plus globale pour atteindre les performances attendues.
Quels sont les différents types de strip-till sur le marché ? Comment ces outils, mécaniques ou végétaux, peuvent nous permettre de gagner en efficience et en résilience sur nos systèmes ? Maxime Merchier, Baptiste Duhamel et Anthony Frison, agronomes dans l’équipe AgroLeague, font un débrief.
Les outils de strip-till
Le strip-till à dents
Les plus communs sont les strip-till à dents. Ils se composent d’un disque ouvreur positionné devant qui va couper les résidus végétaux pour que la dent ne bourre pas. Les chasse débris permettent d’évacuer les résidus coupés par le disque et sont suivis par une dent. Le dernier élément, que l’on utilise ou pas en fonction de la période, est une roue de rappui pour faire un travail d’émiettement de la terre derrière le passage de la dent. Cela permet de replaquer le sol pour maintenir l’humidité. On va plutôt l’utiliser au printemps. On passe avec de la vitesse (10-12 km/h) pour affiner la ligne de semis. On va créer de la terre fine pour créer un lit de semences optimum pour la culture de printemps qui sera implantée idéalement dans les 2-3 jours suivants. A contrario de l’automne, où l’on va chercher à faire un travail plutôt grossier pour laisser les conditions de l’hiver dégrader naturellement les mottes. On ne va pas forcément chercher à avoir de la vitesse (entre 3 et 5 km/h).
Il existe un large éventail de strip-till à dents selon les modèles. Souvent, au printemps, on utilise une dent assez fine qu’on trouve dans des outils de préparation de lit de semence pour réchauffer la ligne de semis.
Le strip-till rotatif
Plutôt que ce soit une dent qui fasse le travail de préparation du lit de semence, c’est une fraise localisée. Il faut avoir des carters pour canaliser les flux de terre afin que la terre fine reste localisée au plus près de la future ligne de semis. Il faut contenir le flux de terre éjecté à proximité du lit de semence pour éviter de favoriser la levée d’adventices dans l'inter-rang. Moins on perturbe l'inter-rang, plus on garde cette terre fine sur le rang, et mieux on gère le salissement.
Le strip-till végétal
Le principe est d’implanter des couverts végétaux localisés. Par exemple, une bande avec des graminées qui ont un système racinaire fasciculé dans les inter-rangs, et éventuellement une féverole localisée sur le rang avec système racinaire pivotant qui va préparer le sol. Pour cette technique, il faut déjà avoir une bonne structure de sol. On localise les couverts d’engrais verts à l’endroit où c’est le plus agronomiquement intéressant pour la culture suivante.
Le strip-till à disques
Beaucoup moins répandus mais ils existent. Dans ce cas, un double disque vient à la place de la dent. Passer du strip-till à disques dans de la terre un peu fraîche peut entraîner un effet de lissage. Cela nécessite d’avoir une bonne structure de sol et un bon taux de matière organique.
Performance agronomique et économique du strip-till
Les intérêts agronomiques qu’on cherche sont multiples.
1 - Réchauffer la ligne de semis
Il faut garder en tête qu’on essaye de profiter des avantages du semis direct tout en limitant les inconvénients que peut avoir le SD sur les cultures de printemps. À savoir le réchauffement du sol. Faire des cultures de printemps en SD pur peut être parfois compliqué. L’avantage de passer le strip-till, c’est de venir chatouiller le sol et créer cette petite différence de température favorable à la germination et au démarrage des cultures de printemps.
2 - Évacuer les résidus végétaux grâce au chasse débris
Ça peut être des résidus de paille ou des couverts d’interculture de l'inter-rang. Pour les cultures de printemps, c’est la course à l’eau. D’autant plus qu’on se dirige vers une situation qui va être de plus en plus sèche. Pour gagner cette course, il faut que le système racinaire aille suffisamment vite pour garder l’humidité et rester au contact de l’humidité des remontées capillaires. S’il décroche, c’est là qu’on peut avoir des pertes de rendements car les cultures vont souffrir de la sécheresse. Quand la structure présente une zone de compaction à 15 cm, le strip-till va permettre de créer suffisamment de terre fine pour que la racine puisse descendre le plus vite possible. L’inconvénient de travailler le sol, est qu’on l’assèche un peu. L’avantage, c’est qu’on va créer des conditions d’enracinement favorables pour que la racine aille descendre rapidement. Ne pas travailler l'inter-rang va permettre aux remontées capillaires de diffuser sur les côtés. C’est intéressant en conditions séchantes, on va maintenir l’humidité pour la culture.
3 - Pas de perturbation de l’activité biologique dans l'inter-rang
On parle des vers de terre mais également des micro-organismes comme les mycorhizes. Les maintenir présente un intérêt agronomique intéressant, surtout pour une plante comme le maïs qui est « mycorrizophile ». Un des gros avantages du strip-till également est que le fait de laisser les résidus végétaux dans l'inter-rang va avoir un impact sur la pression des ravageurs comme le taupin par exemple. S'il n’y a plus de racines vivantes, les attaques de ravageurs vont se focaliser sur la culture.
4 - Augmenter la portance
Si on arrive à maintenir un inter-rang portant, au moment de la récolte on va moins impacter le sol. Quand on essaie d’aller vers du semis direct, un sol qui n’est pas compacté a priori, n’a pas besoin d’être décompacté. Donc, on va plus facilement pouvoir revenir avec du travail simplifié ou du SD. Un sol organisé crée la portance, c’est une préservation de capital.
Au niveau économique
Après la préservation du capital sol, on parle économie. Des essais menés par I’ITB sur une comparaison système labour/strip-till pour la betterave et le colza, ont montré que sur la betterave, on pouvait gagner 35% de temps sur la préparation du sol; sur du colza, 15%. Au niveau économies de carburant : 55% sur betterave et 48% sur colza. La largeur de travail est réduite donc la consommation de fuel est réduite. On économise du temps : un passage d’un strip-till prend moins de temps qu’un labour du fait qu’on peut passer plus vite et moins tirant car on a moins de terre à bouger.
Cela joue un rôle également dans la lutte contre l’érosion. Surtout pour ceux qui ont des terres limons battantes ou en pente.
Maxime Merchier a mis en place des essais en strip-till sur maïs, colza, betterave et potimarron. Et des essais de strip-till végétal. Il en existe 2 types :
- L’interculture dans l'inter-rang et la ligne de semis à nu, comme les ACSistes nord-américains. Cela permet d’avoir les avantages d’un sol couvert (activité biologique, prospection racinaire, couverture du sol, humidité) sans avoir de résidus végétaux sur la future ligne de semis.
- Strip-till dans l’interculture et semis de féverole sur la ligne de semis. Il faut laisser la féverole démarrer au printemps, puis rouler la parcelle et semer le maïs là-dessus. Localiser une féverole à l’endroit d’un futur rang de semis, c’est un peu comme mettre un engrais starter.
Le mot de la fin ?
La technique du strip-till peut apporter de nombreux avantages mais elle n’est pas évidente à maîtriser. Le réglage d’un strip-till est délicat : il doit être bien réglé pour atteindre les performances qu’on lui demande. Il faut bien comprendre l’utilisation de ce type d’outil et réfléchir aussi à l’après passage. Les réglages sont surtout liés à ça. Cela reste un outil simple mais il est délicat à utiliser car les conditions d’humidité du sol doivent être optimales pour ne pas faire plus de mal que de bien.
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