Réussir le maïs irrigué sous couvert : retour d’expérience

Couverts permanents, semis direct, maïs - Daniel Brémond est agriculteur dans la vallée de la Durance, dans le département des Alpes de Hautes Provence. Installé depuis 1986, il a commencé à produire des grandes cultures en système classique avant de passer en TCS puis en semis direct sous couvert végétal vivant. Dans l’Agronomie & Nous aujourd’hui, Daniel nous donne son retour d’expérience sur les tenants et aboutissants de sa transition en agriculture de conservation. Pourquoi a-t-il décidé de changer son système, comment a-t-il adapté ses pratiques à ce modèle et quels résultats a-t-il obtenus ?

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Daniel Brémond est agriculteur dans la vallée de la Durance, dans le département des Alpes de Hautes Provence. Installé depuis 1986, il a commencé à produire des grandes cultures en système classique avant de passer en TCS puis en semis direct sous couvert végétal vivant. Dans L'Agronomie & Nous aujourd’hui, Daniel nous donne son retour d’expérience sur les tenants et aboutissants de sa transition en agriculture de conservation. Pourquoi a-t-il décidé de changer son système, comment a-t-il adapté ses pratiques à ce modèle et quels résultats a-t-il obtenus ? 

Historique de mon exploitation

J’ai commencé l’agriculture en 1986 en système classique. J’ai mis en place mes premiers essais de semis direct en 1987 pour implanter du soja en deuxième culture après une orge, un pois ou un blé dur en jouant sur la précocité des variétés. Ces premiers essais ont été très concluants. J’ai remarqué que ce type d’implantation fonctionnait mieux que le TCS et le labour. Il y avait une meilleure rétention en eau dans le sol. 

 J’ai voyagé en Australie dans les années 1990 pour observer comment les agriculteurs australiens implémentaient les techniques culturales simplifiées dans leur climat sec. J’ai par la suite essayé sur mon système mais je n’ai pas été satisfait des résultats. Les sols se refermaient, les problèmes d’adventices sont arrivés.

Dans les années 1992 avec la nouvelle PAC, il a fallu travailler plus rapidement et réduire les coûts. J’ai totalement arrêté le labour et abandonné la rotation. Je faisais de la monoculture blé dur avec un peu de betterave porte graine et de pois. J’étais parti sur un système économique et non agronomique. Je n’étais pas satisfait. 

J’ai commencé à vraiment comprendre l’intérêt des couverts végétaux lorsque j’ai décidé de mettre du sainfoin sur mes parcelles en jachère. Mes voisins qui avaient eu des dérogations pour  mettre en place des jachères nues ont servi de témoins. Quand je cassais mes jachères en sainfoin et que j’implantais un blé derrière, j’avais des plus beaux blés que mes voisins qui avaient laissé le sol nu.  À l’époque, ce n’était encore que des constatations, il n’y avait pas vraiment de méthode scientifique derrière.

En 2006, avec le Grenelle de l’environnement, il fallait baisser les taux de nitrates dans l’eau, qui venait essentiellement de la mauvaise gestion de la fertilisation azotée en grandes cultures. C’est à ce moment que j’ai vraiment commencé à m’intéresser à l’agriculture de conservation. J’ai commencé les mélanges de couverts en ayant un vrai raisonnement agronomique derrière. En 2010, j’ai commandé un semoir SD en Angleterre et j’ai commencé à implémenter ces méthodes sur mon système. 

Dans ce cadre, ma rencontre avec Jean-Claude Quillet a été un des éléments clés qui a participé à la construction de mon modèle. Ensuite est arrivé Lucien Seguy avec son approche de couverts vivants, de cultures associées avec légumineuses, etc. À l’époque, ça me paraissait impossible car je ne me sentais pas prêt psychologiquement à passer ce pas et je considérais que mes sols n’étaient pas prêts. Il se trouve que c’est aujourd’hui les méthodes que j’emploie et qui fonctionnent.

Comment je réfléchis mon système en fonction des conditions pédoclimatiques 

En climat méditerranéen, les précipitations sont inégalement réparties sur l’année. Il est difficile d’implanter des couverts d’été car il fait trop sec. C’est pour cette raison que j’ai décidé de partir sur des couverts vivants.

Il faut savoir que j’ai des sols, bien qu’hétérogènes, plutôt argilo-calcaires et sablo-limoneux. Je suis parti sur du sainfoin car c’est une plante qui pousse bien dans des sols pourvus en calcaire. Il apporte de l’azote pour le fonctionnement du sol, développe un réseau mycorhizien intéressant, décompacte le sol avec ses racines, apporte une couverture qui conserve l’humidité. Des éléments qui aident à l’enracinement du maïs. 

J’ai commencé à semer mes premiers maïs sous couvert vivant en 2012. Pour réussir en SDSCV, il faut bien contrôler le couvert pour qu’il ne prenne pas le pas sur la culture. Le sainfoin est plus résistant aux herbicides que la luzerne ou le trèfle donc il est plus facile de contrôler les adventices en choisissant cette espèce dans le couvert. 

Itinéraire cultural actuel sur maïs

Après avoir testé les couverts de sainfoin, j’ai eu l’idée de faire des doubles couverts ou couvert relais. Après un blé, en opportuniste quand il y a plus de 15 mm de pluie ou avec l’aide de l’irrigation, je mets en place un couvert composé de sainfoin et de sorgho. Il faut arriver à moduler les doses pour ne pas que le sorgho prenne trop le pas sur le sainfoin. Le sorgho est une plante d’été qui va faire de la biomasse pour rapporter du carbone dans le sol (entre 7 et 10 t/ha de biomasse). Dans un premier temps, le sainfoin reste en-dessous. Je broie le sorgho en août quand il fait un mètre de haut. Fin octobre - début novembre je le roule pour ne pas le laisser monter en graine. Ensuite, le sainfoin redémarre en sortie d’hiver. Le sorgho est consommé par le sol. Le sainfoin permet de faire de la racine et de développer le réseau des micro-organismes. 

Je sème mon maïs fin mars/début avril dans ce couvert de sainfoin en le contrôlant (2 fois 1/2 dose ou 1/4 de dose). Quand le maïs fait un mètre de haut, je commence à irriguer. Le maïs est irrigué jusqu’à fin juillet début août. Le sainfoin va mourir en juillet par la concurrence du maïs. Il reste quelques tiges sèches mais le sainfoin a disparu.

Ensuite, je réimplante un couvert derrière le maïs composé de essentiellement de graminées (avoine de printemps car elle se développe rapidement avant l’hiver, à laquelle je peux rajouter un peu de féverole, de pois fourrager ou de vesce). Puis je sème du soja dedans. 

Résultats obtenus

J’arrive en moyenne à des rendements de 120 à 140 qx/ha de maïs. J’ai diminué mes charges de travail du sol et d’intrants. Je produis mes propres semences de sainfoin donc le couvert n’est pas une grosse charge pour moi. 

En passant en semis direct sous couvert végétal vivant, on investit dans un système. Dans un premier temps, on fait des économies sur le travail du sol et les intrants. Ensuite, les résultats arrivent au bout de quelques années. On commence par raisonner le système, ramener de la matière organique, avoir de l’activité biologique. Au début, j’avais un taux de matière organique d’1,5%. Maintenant je suis entre 3% et 4% selon les parcelles avec 2/3 de matière organique stable et 1/3 de matière organique labile.

Mes échecs et mes réussites

Je pense que ma plus grosse erreur était de vouloir aller trop vite, il a fallu du temps pour arriver où j’en suis aujourd’hui. 

À part ça, je considère que chaque essai que j’ai mis en place m’a apporté un apprentissage. J’ai rencontré des problèmes, j’ai essuyé des plâtres, mais j’ai toujours réussi à m’adapter. 

Ma réussite : j’ai un système fonctionnel, viable et résilient. 

Conclusion

Il n’y a pas une année pareille, on s’adapte aux conditions climatiques. Il n’y a pas de recette miracle, ça passe par l’observation et une compréhension en profondeur du système.

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