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La régulation naturelle est le principal facteur de gestion des ravageurs dans les agrosystèmes. Parmi les auxiliaires de cultures, les carabes sont des insectes particulièrement intéressants car ce sont des prédateurs de bioagresseurs présents dans nos agrosystèmes comme les limaces et les pucerons.
Cette grande famille d’arthropodes est très étudiée en milieu agricole car leur taille les rend facilement identifiables et ils constituent de vrais bio-indicateurs de l’évolution des habitats. Autrement dit, la réponse du carabe à une perturbation du milieu est considérée comme représentative de l’ensemble de la perturbation pour les autres insectes. Ils sont donc souvent utilisés comme insectes de référence pour étudier les agrosystèmes, et notamment pour ceux qui sont en transition vers des pratiques de réduction du travail du sol et/ou des pesticides.
Dans L’Agronomie & Nous, Anthony Frison, agronome chez AgroLeague et agriculteur dans le Loiret, nous partage des éléments intéressants à prendre en compte pour favoriser le peuplement et la diversité des carabes sur ses parcelles et permettre une meilleure bio-régulation des ravageurs.
Les pratiques culturales influencent le nombre d’individus et la diversité d’espèces des carabes
Parmi la grande famille des carabes, il existe plus de 1000 espèces que l’on retrouve dans tous les milieux. On en recense environ 300 dans les systèmes agricoles. Pour comprendre son rôle dans les agrosystèmes, il est important d’avoir en tête le fonctionnement de son cycle de reproduction.
Le cycle du carabe commence par 3 stades larvaires. Pendant ces stades, ces larves sont mobiles et en grande majorité carnivores. On considère que c’est le stade le plus efficace en termes de prédation des bio-agresseurs. Ensuite, vient le stade nymphe (de 1 à 6 mois), qui est le stade de transformation le plus sensible car la nymphe est immobile. C’est à ce stade que les perturbations du milieu ont le plus d’impact sur le développement de cet auxiliaire. Puis vient le stade adulte, stade omnivore opportuniste. On admet qu’il faut environ 4 ans pour atteindre une biodiversité propre à la parcelle.
Le carabe est un insecte terricole, il ne vole pas. Sa reproduction se fait en terre : les œufs sont enfouis dans le sol à une profondeur qui varie entre 5 et 30 cm selon les espèces. Les pratiques culturales jouent donc un rôle essentiel sur la conservation des habitats et le développement des ces auxiliaires. Dans ce cadre, la mise en place d’aménagements pérennes et le travail du sol ont un impact direct sur l’adaptation et la réponse du carabe au milieu.
Résultats d’une étude menée sur des exploitations agricoles du Loiret
Une étude a été menée en 2017 et 2018 sur 15 exploitations de la zone nord Loiret, dont celle d’Anthony. Elle consistait à installer des pièges en bordure et à l’intérieur des parcelles afin de comparer l’impact de la perturbation du milieu sur les populations de carabes à l’échelle parcellaire et inter-exploitations selon les types de pratiques (labour, techniques simplifiées, semis direct).
Le premier élément intéressant à souligner est la présence de carabes sur toutes les fermes, indépendamment de leurs pratiques de travail du sol. Sur le secteur (zone de plaine avec relativement peu de milieux naturels), a été observé 23% de la diversité du département en carabes chez les agriculteurs qui ont participé à l’étude. Un léger mieux a été observé sur les parcelles en non-labour, qui peut s’expliquer par le travail du sol moins profond.
Différence entre bordure et intérieur du champ
Dans la majorité des cas, a été observée une plus grande diversité d’espèces en bordure du champ avec une population plus restreinte; et une plus grande quantité d’individus avec une moindre diversité à l’intérieur du champ. La perturbation qui se crée à l’intérieur de la parcelle par les pratiques culturales favorise le développement des carabes opportunistes.
On relève souvent un antagonisme entre diversité et abondance, ce qui témoigne en réalité des perturbations du milieu. Plus un milieu est perturbé, moins il y a d’espèces et plus ces espèces peuvent s’épanouir et se développer. Autrement dit, on sélectionne des espèces tolérantes, donc des grandes densités de population, qui peuvent aller jusqu’à des pullulations. Les bordures de champ étant des milieux plus stables que l’intérieur des parcelles, il est logique de capturer plus d’espèces mais en plus petit nombre sur les bordures. La destruction des niches écologiques de certaines espèces laisse la place à celles qui sont les mieux adaptées pour se développer.
Comparaison entre 2 types de parcellaires
Chez Anthony, des pièges ont été mis en place sur une parcelle en plaine (« plein champ ») et une autre à proximité d’un milieu semi naturel (à 100 m d’une lisière de bois avec présence d’une vallée et d’une rivière).
C'est sur la parcelle plein champs que l’on retrouve le plus grand nombre de carabes, mais avec une diversité moindre (3000 carabes et 16 espèces différentes). Sur la parcelle près d'un milieu naturel, on retrouve une population moins nombreuse mais plus diversifiée (1000 carabes pour 22 espèces). Hors, les études nous montrent que c'est bien la diversité des espèces qui est importante pour maîtriser des ravageurs comme les limaces.
Toujours garder en tête l’aspect économique dans le pilotage agronomique
Au niveau de la stratégie de lutte naturelle, la mise en place d’aménagements (haies, bandes enherbées, etc) fournit des habitats pérennes pour les auxiliaires de cultures et favorise leur développement. Les pratiques de conservation comme le non labour, la mise en place de couverts végétaux diversifiés sont également des éléments qui permettent de limiter la perturbation du milieu et favorise la diversité et le peuplement des carabes dans les agrosystèmes.
La vision doit être systémique dans la stratégie de lutte et les pratiques culturales. Par exemple, des études américaines ont constaté des pullulations de limaces sur soja 2 ans après des traitements aux néonicotinoïdes avec une perte de rendement de 20%. La limace n’étant pas un insecte, elle ne meurt pas en mangeant une plantule traitée. En revanche, le carabe qui se nourrit de limaces sera impacté par le phénomène de bioaccumulation. On constate aussi plus de dégâts limaces sur les blés de colza qui ont été traités avec plusieurs insecticides comparés à un autre précédent ou à un colza 0 insecticide.
Conclusion
3 points à retenir sur la régulation naturelle par les carabes :
- Le carabe possède un potentiel de régulation dans la lutte intégrée contre les bio-agresseurs comme les limaces. C’est donc un levier intéressant à prendre en compte dans un objectif de réduction des pesticides.
- Avoir un milieu moins perturbé entraîne une plus grande diversité d’espèces. Chaque espèce se comporte différemment, donc avoir une plus grande diversité d’espèces permet de faire face à davantage d’aléas.
- Toujours garder le rapport économique en tête. La réduction des insecticides est une piste intéressante mais doit être vue sur le long terme et intégrée dans une stratégie globale sur la ferme.
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