Fonctionnement, avantages et inconvénients du semis direct

Ecophyto, Certiphyto, Conseil stratégique phytosanitaire… l’agriculture française se veut de plus en plus respectueuse de l’environnement grâce à une réglementation visant les produits phytosanitaires. Représentant souvent un risque non négligeable pour la santé et les milieux naturels, les phytos sont des pesticides, d’origine chimique ou organique, indispensables dans la lutte contre les nombreux bioagresseurs des plantes. En système conventionnel, en agriculture de conservation ou en agriculture biologique, les produits phytosanitaires permettent de maximiser le rendement d’une culture, à condition d’en faire un usage adapté et conforme à la réglementation en vigueur.

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Sommaire

Qu’est ce que le semis direct ?

En France comme à l’étranger, les pouvoirs publics sont de plus en plus engagés auprès des agriculteurs qui adoptent les techniques d’agriculture de conservation. Le semis direct en est un des piliers. Il s’agit d’une technique d’implantation des cultures sans travail préalable du sol (décompactage, aération, affinage).

  • Sur le plan agronomique, le semis direct s’appuie sur les régulations naturelles afin de préserver la vie du sol et la qualité de sa structure. 
  • Sur le plan économique, une diminution du travail du sol permet une économie de temps et de carburant

Le semis direct se pratique au moyen d’un semoir spécifique, sur un sol nu ou sous un couvert végétal, mort ou vivant.

Les inconvénients du travail du sol

Selon les Chambres d’agriculture de Bretagne, le travail du sol représente, en système conventionnel, jusqu’à 40% du temps consacré à une culture !

Le labour est une opération gourmande en carburant, dont le prix ne cesse d’augmenter : en décembre 2022, le prix du GNR était à 1,30 € le litre alors qu’il coûtait 0,70 € en décembre 2020. Les charges d’exploitation augmentent d’autant plus si le travail du sol est confié à un employé.

Par ailleurs, le labour peut également engendrer des problèmes lorsqu’il est effectué sur un sol à risque. Par exemple, un sol très limoneux ou mal ressuyé expose à de nombreux problèmes : semelle de labour, érosion, lixiviation et perte de matière organique.

Erosion du sol
Un sol soumis à l’érosion (© Henri Carmié Agence française pour la biodiversité)
Remarque
Le labour n’est pas praticable sur des parcelles à sol superficiel ou à fort relief.

Vers la fin du labour ?

Face à l’urgence climatique et l’engouement autour de l’agriculture de conservation, le labour est parfois diabolisé. Cependant, bien maîtrisé, il reste un outil efficace de gestion des adventices, de contrôle des limaces et mulots et de préparation du lit de semence. Semis direct et labour ne sont donc pas à opposer, mais à considérer comme des outils à utiliser en fonction des spécificités d’une exploitation.

L’important reste d’adapter ses pratiques à son environnement, au bon endroit, au bon moment. Par exemple, sur une parcelle au sol peu profond, calcaire et caillouteux, le semis direct permet d’implanter les cultures malgré la contrainte des cailloux, et évite d’assécher le sol comme le ferait un labour. Au contraire, prenons l’exemple d’une parcelle infestée de ray-grass. Lorsqu’elles sont enfouies, 75% des graines de cette adventice meurent après un an sous terre. Dans cette situation, des labours permettent donc de lutter efficacement contre le ray-grass, à condition d’être espacés de plus de 3 ans (soit quand 99% de la quantité initiale de graines sont détruits) pour ne pas faire remonter les graines adventices enfouies les années précédentes.

Les avantages économiques et agronomiques du semis sans labour

Le semis direct comporte de nombreux avantages : 

  • il utilise la vie du sol au bénéfice de l’agriculteur
  • il supprime les dépenses d’intrants liées au travail du sol
  • il augmente la résilience du sol, et donc de la culture, aux aléas climatiques.

Enrichir le sol grâce à la faune et la flore

Prenons l’exemple d’un sol forestier. Si vous grattez les premiers centimètres de terre, il grouille de vie, entre les insectes, les champignons, et les micro-organismes invisibles à l'œil nu.

Cette faune et cette flore du sol dégradent la matière organique et l’enfouissent, assurant la fertilité du sol. Mais l’action des outils agricoles sur le sol détruit leur habitat. Passer au semis direct permet à toute cette biodiversité de recoloniser la parcelle et de participer à fertiliser le sol de manière organique.

Eco système du sol
Collemboles, vers, champignons : un sol sain est un sol vivant !

Autres alliés essentiels favorisés par le semis direct : les vers de terre. On les nomme “espèces ingénieures” car leurs actions modifient l’écosystème du sol agricole. En effet, ces derniers aèrent le sol par leurs galeries, qui font circuler l’air et l’eau et augmentent l’activité microbienne. Avec le temps, ils peuvent même corriger des sols tassés !

Galerie de vers de terres
On peut observer par tomographie l’effet des vers de terre sur le sol. À gauche, un sol compacté non travaillé. A droite, le même sol 2 ans plus tard. Les galeries des vers de terre ont restructuré le sol tassé

Diminuer les coûts d’intrants et de mécanisation

Le prix du carburant est en augmentation constante depuis 2020 :

Prix du GNR

L’adoption du semis direct représente donc une économie importante de carburant : selon les Chambres d’agriculture de la région Centre, la consommation d’un tracteur passe de 90 à 110 litres par hectare à entre 50 et 60 litres par hectare.

Consommation d'un tracteur

Par ailleurs, abandonner la charrue signifie aussi des besoins moindres en puissance, et donc des tracteurs de plus petites dimensions, donc moins coûteux.

Concernant la fertilisation azotée, le semis direct permet aussi de réduire les apports d’engrais. En effet, en stimulant l’activité microbienne, le sol minéralise davantage l’azote organique.

Le cycle de l'azote dans le sol
Cycle de l’azote dans le sol. L’azote lié à la matière organique du sol (au centre) doit être minéralisé (4) pour être assimilable par les cultures (7). Une vie microbienne intense accélère ce processus.

Le semis direct sous couvert végétal poursuit la même logique de protection et d’enrichissement des sols, mais avec des bénéfices en termes de réduction des intrants bien plus importants. 

En effet, une couverture végétale offre des avantages agronomiques complémentaires au semis direct. Par exemple, la Féverole est une espèce de couvert réputée pour sa capacité à capter l’azote présent dans l’atmosphère.

En plus, un couvert végétal offre une concurrence naturelle aux adventices et permet ainsi de diminuer l’usage de produits phytosanitaires.

Améliorer la résilience du sol face aux aléas climatiques

Les événements climatiques, comme les épisodes de sécheresse ou de pluies abondantes, sont de plus en plus imprévisibles. La pratique du semis direct permet d’atténuer l’effet de ces aléas de deux façons. 

D”abord avec le maintien des résidus qui forment un mulch, zone tampon protégeant de la sécheresse. Les pailles laissées sur place augmentent la teneur en matière organique du sol, et la vie du sol confère une meilleure microporosité qui limite le ruissellement. Les sols cultivés en semis direct absorbent et stockent donc mieux l’eau.

Mulch
Mulch de pailles de céréales chez un membre d'AgroLeague

Les inconvénients du semis direct

On l’a vu, le semis direct refait la part belle aux processus biologiques naturels du sol. Mais pour obtenir un sol agricole avec un écosystème performant et résilient, il faut du temps !

En effet, il faut parfois plusieurs années entre le passage d’une parcelle en semis direct et l’apparition des effets bénéfiques de cette conversion.

De plus, cette technique de semis nécessite de s’équiper d’un semoir à semis direct, comme un semoir à dents ou un semoir à disques, dont le coût peut être plus ou moins important en fonction de l’utilisation.

Prix de revient semoir direct
Source : Frcuma Occitanie

Enfin, l’abandon du travail du sol entraîne souvent une hausse de l’utilisation de glyphosate, bien que certains agriculteurs obtiennent de très bons résultats en optimisant leurs couverts.

Le semis direct est un outil à la disposition de l’agriculteur, et doit être envisagé en association avec d’autres pratiques comme : 

  • la couverture permanente du sol, 
  • l’allongement des rotations,
  • la diversification des cultures. 

C’est donc une partie d’une démarche complexe, qui demande d’apprendre, d’expérimenter et de s’adapter.

AgroLeague a déjà accompagné plus de 1 000 agriculteurs avec un conseil indépendant et sur-mesure pour réussir leur passage au semis direct. Nos agronomes sont disponibles 7 jours sur 7 pour vous conseiller.

Comment réussir la transition vers le semis direct ?

Réussir une conversion vers le semis direct implique :

  • Une diminution progressive du labour,
  • De bien choisir la culture concernée afin de minimiser les risques,
  • Une bonne gestion des résidus du sol avant semis
  • L’utilisation de matériel adapté au semis direct

Diminuer progressivement le travail du sol

Si je peux donner un conseil aux agris qui veulent se lancer, c’est d’y aller par étapes:  ce n’est pas évident de passer du tout au rien.

Rémy, agriculteur membre d’AgroLeague dans les Landes

Les différences d’activité biologique entre un sol travaillé et un sol en semis direct peuvent être très grandes. Lorsqu’on décide de passer au non-labour, il faut laisser le temps aux régulations naturelles de se mettre en place.

Le plus sûr est donc de commencer par réduire pas à pas l’intensité du travail du sol.

On peut agir de trois façons sur la fréquence, l’intensité et sur la profondeur de travail du sol.

  • Réduire la fréquence : on passe d’un labour systématique à un labour tous les 3 ans, puis seulement quand cela devient nécessaire - pour gérer les adventices par exemple. 
  • Diminuer l’intensité : on peut limiter le travail profond à un décompactage moins agressif pour le sol qu’un labour car la terre n’est pas retournée.
  • Réduire la profondeur : par exemple en utilisant un déchaumeur qui ne perturbe que les 10 premiers centimètres du sol. 

Ce changement progressif permet de s’habituer à de nouvelles pratiques culturales, de faire revenir peu à peu la biodiversité dans les horizons (strates du sol) non travaillés. 

Remarque : tout au long de la transition vers le semis direct et même après, rien n’interdit de venir travailler le sol si le besoin s’en fait sentir.

Remarque
Tout au long de la transition vers le semis direct et même après, rien n’interdit de venir travailler le sol si le besoin s’en fait sentir.

Choisir un contexte peu risqué et une culture adaptée

Comme évoqué précédemment, le semis direct implique une technicité plus importante. Autrement dit, commettre des erreurs techniques, surtout les premières années, peut avoir un impact sur le rendement final.

Pour minimiser les risques, vous devez mettre toutes les chances de votre côté en choisissant les conditions de culture optimales

Cela passe d’abord par le choix d’un sol propice au semis direct : bien drainé, avec une bonne disponibilité des minéraux, ni trop chaud ni trop froid. Il est pertinent d’effectuer une analyse du sol afin d’en connaître les propriétés agronomiques de façon détaillée.

Bon à savoir
En rejoignant AgroLeague, vous pouvez réaliser une analyse de sol et de sève en laboratoire. Les résultats sont ensuite communiqués après avoir été analysés par nos agronomes.

Par ailleurs, certaines cultures sont mieux adaptées à un passage au semis-direct. Par exemple, les cultures d’automne sont moins sensibles aux éventuelles erreurs techniques, elles laissent une plus grande marge de manœuvre pour “rectifier le tir” si besoin. Les céréales assolées, comme un blé après un colza ou un escourgeon après un pois, sont des cultures assez simples à réaliser en semis direct. Une culture de blé a l’avantage d’avoir peu de problèmes de ravageurs et une bonne capacité à taller, c’est-à-dire à multiplier les tiges qui vont donner des épis, ce qui assure le rendement.

Attention
Les cultures de céréales à paille précédées d’une céréale à paille sont particulièrement difficiles à réussir en semis direct. Mieux vaut donc commencer le semis direct à un autre moment de la rotation.

Vous souhaitez obtenir des conseils agronomiques adaptés à vos différentes parcelles ? Contactez-nous !

Bien gérer les résidus du sol avant semis

Autre point de vigilance avant un semis direct : la gestion des résidus, débris végétaux issus de la culture précédente. 

Sans travail du sol pour les enfouir et les disperser, on compte sur l’action des microorganismes pour dégrader ces résidus. Les résidus de culture constituent en effet un réservoir de matière organique du sol. Or, pour les dégrader et incorporer cette matière au sol, les microorganismes consomment de l’azote. Cet azote est ensuite restitué sous forme minérale disponible pour la culture. Donc, plus la vie du sol est intense, plus vite les résidus sont dégradés, et plus vite l’azote immobilisé pour cette dégradation est restitué aux cultures

Heureusement, il existe des méthodes pour booster la vie du sol, comme l’application de thés de compost oxygénés. Ces préparations sont un concentré de bactéries et champignons bénéfiques, que l’on incorpore directement au sol, une sorte de probiotique de votre écosystème souterrain ! 

Enfin les résidus laissés sur place forment un mulch dont on recherche les propriétés couvrantes et la fonction d’abri pour des auxiliaires des cultures. 

Cependant, un mulch trop épais peut favoriser l’installation de limaces en maintenant l’humidité au sol et en les cachant des prédateurs. Contre ce phénomène, il peut être recommandé de semer directement après la destruction des couverts, pour que les limaces mangent les débris végétaux frais plutôt que la nouvelle culture levée. Il existe aussi des outils pour optimiser la dispersion des résidus tels que la herse à paille.

Herse à paille
Herse à paille

Utiliser un matériel adapté

Le choix du matériel reste essentiel pour réussir son semis direct. Un semoir classique ne suffit plus, puisqu’il faut insérer la semence dans un sol qui n’a pas été affiné par un travail du sol préalable.

Pour cela, les semoirs à semis direct sont équipés :

  • d’un élément ouvreur, qui tranche le sol sur la ligne de semis sur 1 à 5 centimètres de profondeur
  • d’un élément qui dépose la graine dans le sillon
  • d’un disque de rappui qui referme le sillon et assure le contact de la graine avec le sol
Semoir à disque
Semoir à disque

Sur le marché, de nombreuses options existent : à disques, à dents, combinant un apport d’engrais ou non, modèles autoconstruits… Il convient donc de se poser les bonnes questions avant de choisir son semoir.

Pour cela, le mieux est de s’appuyer sur des retours d’expériences ! En rejoignant AgroLeague, vous entrez en contact avec une communauté d’agronomes et d’agriculteurs partageant des ambitions et une vision commune.