Gestion des amendements calciques et basiques partie 1 : le pH, fonctionnement et impact

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Sommaire

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🧐 La vidéo en détail

  • 00:00-01:50 Introduction
  • 01:50 Préalable : explications sur les formes de le calcium dans le sol
  • 3:24 Le pH : Qu'est ce que c'est et quels impacts ?
  • 3:24 Définition du pH
  • 4:00 La variabilité du pH sur l'année
  • 05:53 Impact sur les plantes
  • 06:32 Impact sur la chimie du sol
  • 07:47 Impact sur l'activité biologique
  • 08:58 Impact sur la fertilité physique
  • 11:08 Causes de l'acidification
  • 16:53 Lien pratique avec le terrain
  • 17:38 Données économiques
  • 19:00 3 point clés à retenir
  • 20:34 Sources bibliographiques
  • 21:10 Conclusion

1. Le calcium dans le sol et son rôle primordial sur la fertilité physique du sol

Il existe des confusions entre les termes de calcium, amendement calcique ou encore calcaire. Tentons d’y voir plus claire car même dans les termes des analyses de sol, persistent des incohérences terminologiques.

  • Calcium : élément chimique du tableau de Mendeleiev. Dans de l’eau, l’ion calcium porte deux charges positives.
  • Amendement calcique : Apport de roches plus ou moins broyées et exogènes à une parcelle agricole. Ces mini morceaux de roche contiennent un calcium dit "insoluble", et d’autres choses. En réalité ce calcium se solubilisera plus ou moins rapidement suivant la finesse de broyage de la roche et sa tendreté.
  • Calcaire : roche contenant une majorité de carbonate de calcium dans sa composition.

Il y a toujours du calcium dans le sol, en proportions variables. Celui peut se présenter sous 4 états différents que l’on regroupe en deux grandes famille :

Le calcium insoluble lié à l’altération de la roche mère, donc que l’on retrouve plutôt dans les sols dits calcaire. Ce type de calcium comprend :

  • du carbonate de calcium ou « calcaire » inactif. Il s’agit de particules grossières de type graviers, sables…
  • du carbonate de calcium ou « calcaire » actif. La nature est identique au calcaire inactif mais la taille des particules est plus fine (taille limon, voir argile. Ce sont ces formes très fines qui sont transformées chimiquement en calcium soluble par l’eau et des acides faibles du sol (acide phosphorique, nitrique, ou encore acides humiques ou fulviques).

Le calcium soluble est le calcium dans la solution du sol, libre ou retenu sur un complexe organo-minéral. Ce type de calcium comprend donc :

  • Le calcium soluble qui se trouve sous diverses formes dans la solution du sol (mélange eau + éléments minéraux et organiques, donc nutritifs).
  • Le calcium échangeable. Le calcium soluble et ses différentes formes (chaux et sels de calcium solubles) peuvent libérer des ions Ca2+ qui vont être adsorbés sur le complexe argilo-humique (CAH) ou se font les échanges cationiques.

2. Le pH : qu'est ce que c'est et quels impacts ?

L'indice de pH

L'indice de pH (potentiel Hydrogène) est l'inverse de la concentration en H+ dans une solution. Autrement dit, plus l’indice est faible, plus l’acidité est forte avec un point neutralité situé à pH 7 (pH<7 acide, pH>7 basique).

Le pH est une grandeur logarithmique. Ainsi, une solution à pH 3 est dix fois plus acide qu'une solution à pH 4. Pour déterminer la valeur du pH d'une solution, plusieurs possibilités existent. Le classique papier de tournesol ou papier pH tout d'abord, qui change de couleur en fonction du pH de la solution dans laquelle il est plongé. Pour obtenir une valeur plus précise, il est possible d'utiliser une électrode à pH reliée à un pH-mètre.

Représentation schématique de l'échelle de pH


Variabilité importante du pH sur l'année

Les analyses de sol indiquent une valeur d'acidité mais ne reflètent pas la dynamique qui existe dans le sol.

Le graphique ci-dessous montre les résultats d'un essai mené par GALYS sur une monoculture de maïs grain irrigué dans les Landes. On s’aperçoit que le pH eau (courbe rouge) est varie dans l'année de 6,3 en été à 7,3 en hiver, soit jusqu’à 1 point d’écart. Le pH est plus élevé pendant la période hivernale car l'activité biologique est au ralenti, la minéralisation qui cause l’acidification est faible. Le pH est plus faible sur les périodes de printemps et d’été là où la minéralisation bat son plein.

L'autre élément à regarder est pH Kcl (courbe bleue). Initialement utilisé comme un indicateur de potentiel d’acidification du sol, les laboratoires se servent plus de cette mesure comme un étalon pour corroborer les valeurs du pH eau.

Il est donc important lorsque l’on regarde une analyse de sol de savoir où l’on se situe dans l’année pour identifier si le sol va être plutôt plus acide ou plus basique que la valeur indiquée sur l’analyse.

Exemple d'un suivi de pH Kcl et pH eau sur une parcelle (source : GALYS)


Impacts sur les plantes

Les cultures s’acclimatent plus ou moins bien à l’acidité. Parmi celles qui peuvent s’adapter sur des pH assez faibles, on peut citer le maïs et les prairies permanentes. Au contraire, les légumes (haricots, épinards), l'orge et le sont plus sensibles à l’acidité (leur optimum se situe autour de pH 6,5 - 7). Le triticale est une culture intermédiaire.

Représentation schématique de la sensibilité des cultures au pH

Impacts sur la chimie du sol

Le pH impacte la solubilisation et l’absorption des éléments par la plante. Sur le graphique ci-dessous, on observe que la plage d’assimilation la plus correcte se situe entre 6,5 et 7. En-dessous de 5,5 certains éléments peuvent être absorbés en excès, comme l’aluminium. Celui-ci peut créer des problèmes de toxicités aluminiques et engendrer des pertes de jusque’à 10% de de rendement en moins, surtout sur blé, colza et prairies.

Certains éléments solubilisent plutôt sur des pH basiques comme le molybdène, d’autres sur des pH acides comme le fer et le manganèse.

Plages d'assimilation des éléments nutritifs en fonction du pH

Impacts sur l'activité biologique

Le pH optimum pour la vie biologique du sol se situe également entre 6 et 7. Les pH trop acides peuvent créer des problèmes de toxicités, un turn over de la matière organique très faible avec des ratios C/N élevés.

Sur la plage optimale, on observe un turn over de la matière organique plus élevé, un renouvellement rapide de la fertilité, beaucoup d'activité biologique et des ratios C/N proche de 10. Les pH trop basiques ont le même effet que les pH acides : ralentissement du turn over de la matière organique et de l'activité biologique, ratios C/N élevés.

Impacts sur la fertilité physique

L'acidité du sol influe sur la stabilité du complexe argile-humiques. Les amendements, en apportant du calcium et en faisant remonter le pH du sol peut créer des conditions favorables pour avoir une bonne stabilité structurale.

La figure ci-dessous présente des photos issues d'essais de l’INRA sur des micro-parcelles avec le même type de sol pour montrer l’impact de la fertilisation sur les propriétés physiques du sol. On observe sur les pH acides moins de mottes et de porosité que sur les pH basiques. Cela montre l’intérêt d’avoir un bon statut acido-basique dans son sol.

Illustration de l'impact de la gestion du pH sur des micro-parcelles

Ce tableau d'ARVALIS récapitule l’impact du pH sur le sol :

  • Toxicité aluminium en dessous de 5,5
  • Disponibilité en phosphore très faible pour un pH <5,5 et >7
  • Meilleure disponibilité des oligo éléments (Mn, Bo, Cu, Zn) pour un pH <6,5 à l'exception du molybdène
  • L'hernie des crucifères est plus importante pour des pH<6,1
  • Piétin échaudage sur pH élevé
  • Reprise en masse du sol sur des pH acides
Impact du pH sur le sol


4. Acidifications et amendements

La concentration en ions H+ crée une acidification du milieu

Cette acidification peut être liée à l’activité biologique qui dégage des H+, aux engrais minéraux de synthèse qui peuvent en relarguer mais aussi en capter suivant le type de d’engrais, au lessivage et à la dénitrification.

Influence de la minéralisation de la matière organique

La figure suivante schématise les procédés chimiques qui interviennent lors de la minéralisation de la matière organique : transformation en ammonium puis en nitrite et nitrate.

  • Ammonification : absorption d'un H+
  • Nitrification : relargage d’un H+
  • Absorption du nitrate : absorbe un H+
  • Absorption du potassium : relargage d’un H+ (la racine acidifie son milieu pour absorber le K)
Mécanismes de l'acidification

Influence des différentes formes d'engrais

Lorsque l'on apporte un engrais, on regarde le flux de proton et l’acidification que l’on peut créer dans l’absorption. Le schéma suivant montre l'influence des différentes formes d’engrais azotés :

  • Absorption d'un ion H+ pour transformer l'urée en ammonium
  • Libération de 2 ions H+ pour transformer l'ammonium en nitrate
  • Prélèvement d’un ion H+ pour que la racine absorbe le nitrate

Si la totalité de l'apport était absorbé par le végétal (pas de préemption par l’activité biologique), l'urée aurait un bilan neutre, l'ammonium un bilan acide et le nitrate un bilan alcalin. Cependant, un sol n’est pas un système fermé et l’activité biologique profite aussi de cet azote. On peut observer une intensification temporaire de l’activité biologique qui crée une acidification locale.

Influence de la forme d'engrais azoté sur l'acidification

Point de clarification : remonter le pH se fait par des bases et non par le calcium

L'acidité dans le sol est causée par les ions H+ principalement, mais aussi Fe3+, Al3+. Les bases sont des ions chargés négativement qui se lie avec les ions H+ et favorise la fixation d’un cation Ca2+ sur le complexe argilo-humique.

Ce n’est donc pas le calcium dans l’amendement qui va jouer sur le pH mais bien la base qui accompagne le calcium. par exemple, lorsqu’une molécule de carbonate de calcium (CaC03) entre en contact avec une molécule d’eau, cela donne un élément Ca2+ et un élément HCO3-. HCO3- va se lier à la charge positive d’un ion H+ et en réduire la concentration dans le milieu.

Représentation schématique du processus par lequel la base qui accompagne le calcium joue sur le pH du sol

Les types d'amendements et leurs bases

Chaque type d'amendement est lié à une base plus ou moins forte qui aura un impact plus ou moins rapide sur le pH :

  • Carbonate de calcium (CaCO3) : produit que l’on retrouve naturellement dans le cycle du calcaire. Les bases sur ces produits sont des bases faibles (qui ne réagissent pas totalement avec l’eau) donc ils auront une action lente sur le pH.
  • Oxyde de calcium (CaO) ou chaux vive : la base O2- est une base forte qui réagit totalement avec l’eau. Ce produit a un effet flash sur le pH du sol.
  • Hydroxyde de calcium (CaOH2) ou chaux éteinte ou chaux vive humidifiée : la base OH- est également une base forte avec une rapidité d’action.
Types d'amendements et bases associées

5. Lien pratique avec le terrain

a) La gestion du pH est primordiale pour les exploitations en transition vers l'ACS

Pour les transitions vers l'ACS, le pH est un élément à gérer avant d'entamer sa transition ou au tout début de celle-ci. En effet, le travail du sol présente l'intérêt de brasser les horizons superficiels et limite les acidifications de surface.

Lorsqu'on passe sur des systèmes sans travail du sol, on peut avoir une décalcification qui s’opère en surface. Cela se produit souvent sur des exploitations en début de transition vers le semis direct car le manque d’activité biologique induit un manque de brassage de l’horizon de surface par les vers de terre. Dans ce cadre, des apports adaptés d’amendements basiques peuvent avoir leur rôle à jouer.

Cela ne doit pas être pris à la légère car lorsque la vie du sol n'est pas encore assez intense pour remplacer un brassage mécanique, cette acidité peu causer du tort au niveau chimique : toxicité, manque d'assimilation d'éléments. Mais aussi au niveau physique en modifiant les propriétés du sol : mauvaise structuration et aération de la surface du sol. Biologiquement un pH trop extrême est aussi néfaste.

Notre conseil : s'assurer d'avoir un pH > 5,8 voire 6 avant d'entamer sa transition permet de s'affranchir de désagréments dont on a pas besoin sur le chemin de la transition.

b) Données économiques

Une étude faite par l’UNIFA en collaboration avec Terrena sur une rotation de 4 ans a comparé des parcelles avec maintien d’un pH proche de la neutralité et des parcelles ayant un sol acide dans des exploitations en polyculture-élevage de l’Ouest de la France.

Les résultats ont montré un gain de productivité de +6% et de rentabilité de +61 €/ha/an pour les parcelles avec un chaulage adapté. Cela démontre l’intérêt d’avoir un pH correct sur l’aspect rendement et sur la marge finale.

3 points clé à retenir

  • pH = inverse de la concentration en H+ dans le sol
  • On neutralise l'acidité par des bases : O2-, HO-, CO3 2-, HCO3-, SiO3 2-
  • Forte variabilité en fonction de la saison : plus acide printemps été automne (avec forte activité biologique)

Bibliographie

https://comifer.asso.fr/images/publications/brochures/brochure_chaulage_maj_2012_chaulage_lt.pdf

https://fertilisation-edu.fr/le-raisonnement-de-la-fertilisation/valeur-neutralisante-et-besoin-en-bases.html

https://www.arvalis-infos.fr/le-chaulage-depend-du-besoin-de-corriger-plus-ou-moins-rapidement-le-ph-acide-d-une-parcelle-@/view-24052-arvarticle.html

https://wiki.aurea.eu/index.php/Le_chaulage

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